Prise en charge des coûts de la médiation

Qui prend en charge les coûts de la médiation ?

La prise en charge des coûts de la médiation par les parties, par un assureur protection juridique ou par l’État, la déductibilité fiscale et les conseils d’un avocat

Le principe de prise en charge des frais et honoraires du médiateur par parts égales

La prise en charge des coûts de la médiation au sens strict (c’est-à-dire les frais et honoraires du médiateur) intervient, en principe, par parts égales, sauf accord contraire entre les parties[1]. Rares sont néanmoins les cas où les parties s’accordent en médiation civile pour déroger à ce principe lorsqu’elles assument personnellement le coût de l’intervention du médiateur. Il existe toutefois bon nombre de différends à l’occasion desquels le coût de la médiation est totalement ou partiellement pris en charge par un tiers qu’il s’agisse d’une assurance dite de protection juridique ou de l’État belge dans le cadre de l’assistance judiciaire.

La prise en charge des coûts de la médiation par un tiers

Les assurances dites de protection juridique

Une couverture principale ou accessoire ?

Il existe sur le marché divers produits assurantiels visant à promouvoir la médiation. Cette couverture peut être l’objet principal du contrat ou l’accessoire d’une autre couverture. Ainsi, il existe une protection juridique accessoire à certaines assurances habitation.

La déductibilité fiscale de certaines primes d’assurance

En 2007, les assureurs de protection juridique se sont réunis au sein d’Assuralia pour convenir des conditions auxquelles doit répondre un contrat d’assurance protection juridique pour être exempté de la taxe annuelle sur les opérations d’assurance prévue par l’article 173 du Code des droits et taxes divers[2]. A la lecture de l’arrêté royal rédigé dans la foulée de cet accord, il s’avère que le coût modéré de la prime (qui ne peut excéder 144 €[3]) est intimement lié à des plafonds d’intervention relativement limités, à diverses exclusions de garantie limitativement énumérées[4] et à des délais d’attente d’un à deux ans pour certains types de litiges (notamment ceux relevant du droit des successions, donations et testaments[5]). Une loi subséquente, celle du 22 avril 2019, a pour objectif de rendre l’assurance protection juridique plus accessible. En pratique, le champ d’application des assurances protections juridiques (avec des exclusions et délais d’attente importants dans certaines matières) a été étendu, tout en maintenant et peaufinant l’aspect déductibilité fiscale de certaines primes.

Attention aux clauses contractuelles d’assurance excluant l’assistance d’un avocat en médiation
Exemple d’exclusion contractuelle

La pratique révèle d’ores et déjà le caractère problématique de l’exclusion contractuelle des avocats de la phase précontentieuse. A titre d’exemple, certaines conditions générales prévoient ceci : « En cas de sinistre, nous faisons à votre place les démarches en vue d’obtenir un arrangement à l’amiable, étant entendu cependant qu’aucune proposition ne sera acceptée sans votre accord, et nous examinons avec vous les mesures à prendre. (…) »[8].

Mise en situation et critiques[9]

Dans un contentieux concernant diverses servitudes où des recherches immobilières approfondies s’imposent avant toute éventuelle démarche ou négociation raisonnée[10], une compagnie a cru bon de mettre en demeure une agence immobilière au motif que la vente projetée de l’immeuble voisin ne tiendrait pas compte du litige. Non contente d’être incorrectement libellée quant à la qualité de son destinataire (présenté à tort comme une personne physique), cette missive recommandée ne répond pas aux exigences d’une mise en demeure. De plus, l’on voit mal en quoi pareille démarche, qui ne concerne d’ailleurs pas directement la partie adverse, permettrait d’obtenir un arrangement à l’amiable avec cette dernière. En cette affaire, le gestionnaire de compagnie s’est de surcroît avéré incapable de justifier l’existence d’un mandat de l’assuré faveur de la compagnie.

L’assistance judiciaire

Les justiciables à revenus modérés peuvent, quant à eux, bénéficier à titre individuel de la gratuité totale ou partielle de la médiation s’ils remplissent les conditions pour jouir de l’assistance judiciaire[11]. Si cette dernière est octroyée par le bureau d’assistance judiciaire « du tribunal qui doit être saisi du litige ou, selon le cas, du lieu où l’acte doit être accompli »[12], c’est l’État qui prend en charge les coûts liés à l’intervention d’un médiateur agréé. Bon nombre de médiateurs agréés refusent encore, pour l’heure, d’intervenir dans le cadre de l’assistance judiciaire, entre autres, car celle-ci ne donne pas lieu à un défraiement à l’aune des multiples prestations généralement effectuées[13].

La déductibilité fiscale des coûts de la médiation

Dans un certain nombre de cas, les coûts de la médiation seront totalement ou partiellement déductibles, à titre de frais professionnels, pour l’une des parties. Ce qui pourrait l’inciter, entre autres, à proposer de déroger au principe de prise de prise en charge des frais et honoraires du médiateur par parts égales

Les précieux conseils d’un avocat

Bon nombre de justiciables et de médiateurs agréés ignorent peu ou prou les règles et principes applicables aux assurances dites de protection juridique[14], à l’assistance judiciaire, à la déductibilité fiscale des coûts de la médiation et à l’aide juridique. Cette dernière concerne, quant à elle, exclusivement la prise en charge, totale ou partielle, des frais d’avocat. Or, un réel accès à la justice sensu lato implique pour un certain nombre de justiciables un recours effectif à ces tiers payants. A cet égard, les conseils d’un avocat s’avèrent généralement plus que précieux[15].

Notes de bas de page

[1] C. jud., art. 1731, § 1.

[2] P.-P. Renson, « Les biens, les assurances et la médiation : va-t-on remettre le procès en question ? », For. Ass., 2009, pp. 25 à 29, spéc. p. 28, n° 12.

[3] A.R. du 15 janvier 2007 déterminant les conditions auxquelles doit répondre un contrat d’assurance protection juridique pour être exempté de la taxe annuelle sur les opérations d’assurance prévue par l’article 173 du Code des droits et taxes divers, M.B., 27 février 2007, p. 9256, art. 8.

[4] A.R. du 15 janvier 2007, art. 7, § 2.

[5] A.R. du 15 janvier 2007, art. 6.

[6] P.-P. Renson, « La médiation : une question de survie pour les avocats », in P.-P. Renson, Prescrire et intervenir en médiation, un nécessaire changement de mentalités ?, Bruxelles, Larcier, 2017, pp. 7 à 53, spéc. n° 19.

[7] En sens contraire, voy. Proposition de loi modifiant la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances et visant à garantir le libre choix d’un avocat dans toute phase judiciaire, dans le cadre d’un contrat d’assurance de la protection juridique, Ann. Parl., Ch., sess. 2014, doc 54 0192/001.

[8] P.-P. Renson, « La médiation : une question de survie pour les avocats », loc. cit. n° 19.

[9] Ibid.

[10] Celle-ci devant intervenir sur la base de critères objectifs.

[11] C. jud., art. 665, al. 1, 5° ; 671 ; 692 et 696.

[12] C. jud., art. 670.

[13] P.-P. Renson, « La copropriété, un terreau fertile pour la médiation », in J.-P. Lannoy et C. Mostin (dir.), De la prévention à la résolution des conflits en copropriété, Bruxelles, Larcier, 2013, pp. 309 à 344, n° 17.

[14] P.-P. Renson, « Les avocats et la médiation », in P.-P. Renson (dir.), Etats généraux de la médiation, Limal, Anthemis, 2015, pp. 91 à 116, n° 23.

[15] P.-P. Renson, « La médiation : une question de survie pour les avocats », loc. cit., n° 19.